Le Blog de Pierre-Alain Goualch

D’emblée, on est saisi par le réalisme et la diversité des sons électro-acoustiques obtenus à partir d’un seul et unique piano de concert, samplé, échantillonné, filtré. Une manière de pianophonie « idéale » où se laissent entendre, sans qu’on sache réellement comment ce diable de Goualch a mené son affaire, autant d’improbables percussions et boîtes à rythmes. Impressionnant et mystérieux, surtout pour qui serait novice en matière de programmation ! Et puis, au-delà de la prouesse technique, cet empêcheur de bidouiller en rond – à qui l’on doit notamment une récente relecture de l’œuvre de Serge Gainsbourg, ainsi qu’une participation fructueuse au « Recycling The Future » d’Yvinek – démontre (et c’est certainement là l’essentiel) qu’il est un remarquable pianiste-improvisateur doublé d’un compositeur malin. Son univers ? Multiple et singulier, brassant ici de près et d’un peu loin tout ce qui a trait au solo, préparé ou non : de John Cage au Turkish Mambo de Lennie Tristano, du « Dedication » d’Herbie Hancock aux autoportraits sonores de Bill Evans, en passant par des monologues de Thelonious Monk, Cecil Taylor et Paul Bley !

Goûtez donc ce ludique « Piano, Inside and Outside » : Vous m’en direz des nouvelles.

 

Jérôme Plasseraud (Jazz Magazine Juin 2003)

 

 

Interview de Pierre-Alain pour le Webzine Audio-Source.

Pierre-Alain GOUALCH, « The Piano, Inside and Outside »

 Une dizaine d’album à son actif dont le dernier “Exploring The Music of Serge Gainsbourg” lui a valu une double nomination aux Victoires du Jazz et aux Django D’or 2002, a tout juste 30 ans Pierre-Alain sort aujourd’hui un album OVNI aux antipodes de son parcours discographique…

 RP : Parle-nous de l’idée de départ de cet album surprenant.

 PAG : J’aime assez me lancer des défis et celui là faisait suite à ma participation à l’album YVINEK sorti il y a quelques mois chez BMG. YVINEK a été pour moi l’occasion de me plonger dans la production minutieuse d’un album concept, comportant beaucoup d’électronique. Jusque là j’avais surtout participé à des albums de Jazz enregistrés live sur quelques jour et ma seul réalisation en tant que producteur et leader etait mon premier album « Voici Ma Main », un album Jazz, enregistré en trois jours et surtout sans post-production évidemment. Pour YVINEK, j’ai pu expérimenter pas mal de techniques hors des sentiers battus ce à quoi m’encourageait Daniel Yvinec. L’idée de base de « The Piano, Inside and Outside » était une exploration de mon instrument, le piano. Exploration dans tous les aspects de « l’ objet », son histoire, ses sonorités conventionnelles ou extrêmes. Je voulais que l’album soit entièrement réalisé avec un piano mais sans restriction de production, montage etc…

 RP : Comment s’est passé l’enregistrement ?

 PAG : C’est une longue histoire qui s’est étalée sur plusieurs années. Avant de me lancer dans l’aventure j’ai fait pas mal d’essais sur mon piano, un Yamaha C3. Je faisais des constructions en re-recording, en enregistrant sur un direct2disc. Je me suis très vite pris au jeu et beaucoup amusé, ce qui m’a incité à aller plus loin. J’ai donc organisé des séances d’enregistrement sur le Steinway D de la Salle Poirel à Nancy aux quelles j’ai convié deux grands amis : Mathieu Chamagne, esprit libre, musicien dont j’apprécie le travail expérimental en musiques électro-acoustiques et Franck Agulhon, un batteur fabuleux mais surtout un musicien ouvert à toutes les expérimentations. J’avais préparé quelques trames mais nous avons surtout improvisé à 3 sur l’instrument et enregistré non stop pendant plusieurs heures le plus de son, de textures, de constructions possibles. La séance à été captée sur un système EMU PARIS par Laurent Thoman pour Loren Record, le Studio qui avait enregistré mon premier album en trio.

 RP : Il n’y a eu qu’un seul jour d’enregistrement, ça parait peu pour un album comme celui là ?

 PAG : En fait mon idée était surtout de constituer une banque de son personnalisée et un toolkit qui devait me permettre de construire l’album. Je voulais également confier ce matériau de base à un compositeur de musique électronique dont j’apprécie énormément le travail qui s’appelle Boris Hug. De mon coté j’utilisais mes temps libres en marge de mes concerts et des cours que je donne à la MAI (Music Academy International). Toute la post-production qui finalement a été bien plus longue que les séances elles-même s’est passée en home studio. L’approche de chaque pièce à été presque systématiquement différente mais la cohésion était assurée par le matériau de base commun. Le fait d’avoir un piano à queue à la maison m’a permis de faire des prises chaque fois que j’en avais besoin, on peut donc entendre deux pianos dans l’album.

 RP : Certaines pièces s’enchaînent sans pause, avais-tu une vision d’ensemble de l’album dès le début du projet ?

 PAG : Non pas du tout, quand je parle d’exploration ça signifie également que je ne savais pas du tout ce que j’allais trouver au bout du projet… Si les pièces s’enchainent c’est parce que pour une bonne partie d’entre elles j’ai créer des micro-pièces transitoires faites d’éléments du morceaux précédent et du suivant. Je voulais ajouter de la cohésion à l’ensemble et je me souvenais de l’album de Prince « Kiss » dans lequel j’avais entendue pour la première fois cette idée.

 RP : Puisque tu nous parles de Prince, peux-tu nous parler de tes influences pour cet album ?

 PAG : Elles sont évidemment très nombreuses et je préfère que l’auditeur se fasse ses propres références. Récemment un ami était persuadé qu’Olivier Messian avait beaucoup influencé certaines pièces de l’album, je le prends comme un grand compliment. Si des gens retrouvent du Messian dans cet album et que d’autre y entendent du Square Pusher, du Prince, du Chopin, du Steve Reich ça voudra peut-être dire que finalement c’est surtout du Pierre-Alain Goualch qu’il y a dedans car j’ai des goûts très éclectiques et je le revendique. Le cliché du pianiste de Jazz est pesant pour moi et après l’album en trio avec André Céccarelli et Rémi Vignolo il m’était important de présenter un œuvre personnelle et très différente même si elle pouvait désorienter certaines personnes qui on suivi mon parcours. De toute manière même si l’hommage à Gainsbourg à été retiré plusieurs fois pour atteindre les 5000 copies je suis tout à fait conscient d’évoluer dans un microcosme confidentiel ce qui relativise beaucoup tout ça.

 RP : J’ai lu sur ton site www.goualch.com que tu avais récemment enregistré de nouveau avec André Céccarelli, Peux-tu nous parler de ce nouveau projet ?

 PAG : L’album devrait s’appeler « Anatomy of a Relationship » il sera pour moi un lien entre « Exploring… » et « The Piano… » mes deux derniers albums. Je ne voulais pas refaire un album en trio jazz acoustique, pas tout de suite. Il intègrera donc les deux aspects de mon travail de ces dernières années. Ce sera une construction qui emmenera l’auditeur dans la mémoire d’un homme qui retrouve les souvenirs d’une aventure amoureuse passée. Il tombe sur une boite contenant ces souvenirs, sa correspondance… Lui reviennent à l’esprit tout un ensemble d’émotions dont certaine le ramène à des chansons, des climats etc… J’ai donc enregistré aussi bien des chansons que des ambiances et des grooves qui me serviront à construire ce projet.

 RP : Pour finir peux tu nous parler du matèriel que tu utilises ?

 PAG : Mon home studio est architecturé autour d’un PC Shuttle SS51G avec un P4 Intel 2.6Ghz, 512Mo de DDR à 333Mhz, 160Go de disque dur Western Digital, une GeForce 4 Ti 4600 128Mo que j’utilise en bi-écran, un Graveur DVD+R Ricoh, une Carte Son TASCAM US-428 24bit et des Enceintes HR824 Mackie. Au point de vue logiciel je travaille sur Cubase SX, ACID 4.0 et SoundForge 6.0…

Ronald Perrin pour Audio-Source

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